Depuis quelques jours et jusqu’à la fin de la semaine, Rio de Janeiro accueille le sommet « Rio+20 », une conférence des Nations Unies sur le développement durable. Cet évènement se tient 20 ans après le « Sommet de la terre de Rio » ou « Eco92 », d’où le nom Rio+20. Le sommet de 1992, marqué par le discours de Serven Cullis-Suzuki, une canadienne de 12 ans, est souvent présenté comme le premier grand évènement ayant permis une prise de conscience écologique et de l’importance du développement durable. Wikipedia indique notamment que ce sommet « a donné le coup d’envoi à un programme ambitieux de lutte mondiale contre les changements climatiques, l’érosion de la biodiversité, la désertification, et l’élimination des produits toxiques dangereux ». Quelques années plus tard, le Protocole de Kyoto était signé, contraignant les Etats signataires à réaliser des efforts nécessaires. La conférence Eco92 a permis une réelle prise de conscience de la question du développement durable, ce qui à l’époque était une victoire.
Dans la continuité, l’objectif de Rio+20 est de réfléchir à « l’avenir que nous voulons » ou encore « aux meilleurs moyens de protéger la Terre et ses 7 milliards d’habitants ». Joli et ambitieux programme ! Pour cela, des centaines d’ONG, entreprises, citoyens et Etats discutent, parfois depuis plusieurs mois. Malheureusement, et même s’il reste encore deux jours pour faire changer les choses, il semble qu’on s’oriente vers un échec. Le Brésil a fourni d’importants efforts pour arriver à un accord coûte que coûte, mais beaucoup d’observateurs s’accordent pour critiquer son manque d’influence et de vision. L’Europe a par ailleurs vivement critiqué le texte proposé par le Brésil en soulignant un manque d’« ambition » et une « régression du multilatéralisme », certains pensent que ce nouveau texte n’apporte aucune avancée par rapport aux engagements pris ces dernières années. Enfin, le journal Le Monde nous informe que pour la presse internationale, « il n’y a pas grand-chose à espérer ». Bref, sur le fond la conférence Rio+20 n’est pas simple et il semble peu probable qu’elle ait un impact positif important pour le futur…
Et alors, comment cette conférence internationale est-elle perçue à Rio, allez-vous me demander. Et bien d’une manière générale je ne sens pas vraiment d’enthousiasme particulier pour cet évènement, alors même que Rio de Janeiro est, durant quelques jours, au centre des regards du monde entier. Mon séjour en France m’a éloigné quelques temps de Rio, mais depuis mon retour dimanche soir le sujet est peu évoqué. J’ai essayé à plusieurs reprises d’en parler autour de moi, de savoir s’ils comptaient participer, etc. Mais les réponses sont presque toutes les mêmes « bien sûr que je participe, je passe des heures et des heures dans les transports pour faire quelques petits kilomètres, mes horaires de travail ont été changés et je commence à 7 heures du matin et je dois trouver une solution pour faire garder mes enfants (les écoles ont fermées pour réduire les embouteillages) ! Plus sérieusement il y a surement des choses très intéressantes mais je n’ai pas le temps ni le courage d’y aller, et cette conférence me complexifie la vie car la ville est paralysée. Et puis je ne pense pas que ça change grand-chose… ». Il faut préciser que j’habite et travaille à quelques kilomètres du principal centre des conférences, donc de nombreuses routes sont interdites, certains collègues ont mis plus 1H30 pour faire 5 ou 7 kilomètres. Du coup, ces aspects pratiques ont tendances à occulter l’intérêt et l’importance du sommet Rio+20 pour une partie des Cariocas. J’ai tout de même quelques copains qui en profitent pour participer à des expositions ou échanges. J’ai d’ailleurs, dès le mois de mai, visité l’exposition La Terre vue du Ciel de Yann Arthus Bertrand qui est exposée sur une place dans le centre de Rio et c’est très sympa…même si, comme me disait la copine avec qui j’ai vu les photos « on va terminer l’exposition déprimé » tant certains commentaires sont alarmants et pessimismes pour le futur…
Et vous, que pensez-vous de Rio+20 ? Pensez-vous que cette conférence va changer quelque chose ? Qu’attendez-vous de ce sommet ? Y participez-vous ou auriez-vous aimé vous y rendre ?
Até logo,
2 Comments
Très marrant, je viens de tomber sur ton blog un peu par hasard en cherchant des infos sur Ilha Grande.
Il se trouve que j’étudiais au Brésil le semestre dernier et que j’ai aussi passé le Carnaval 2012 à Recife/Olinda, que le monde est petit.
Je suis actuellement à New York, en stage aux Nations Unies, depuis mi-mars, et j’ai bossé sur Rio+20 ces trois derniers mois. La portée de la conférence est assez difficile à analyser pour le moment.
Bien évidemment, le manque d’accord contraignant et la difficulté à composer un texte qui met d’accord tout le monde sont à déplorer. La volonté de croissance verte qui avait été évoquée pendant les pré-négociations à New York n’a pas été traduite dans le texte adopté au final. C’est très décevant, surtout quand on sait que les pré-négociations ont duré des semaines (et que chacun des mots utilisés dans le Draft Zero a été discuté en détails, parfois des journées entières). Il y a également de nombreuses dispositions qui avaient été proposées mais ne seront pas adoptées, comme la reconnaissance du droit à l’eau. D’autres problèmes soulevés font scandale (comme l’arrêt de la protection internationale de l’espace Arctique), tout comme le je-m’en-foutisme de certains chefs d’Etat qui se sont pointés à l’arrache à la conférence, préférant le G20, mais souriant sur la photo officielle (ben oui, c’est ça qui restera dans 20 ans). D’un point de vue personnel et écolo, je suis assez déçue de cette conférence.
Du point de vue de qqn bossant sur Rio+20, c’est différent. D’une part il faut se féliciter du succès du sommet de la société civile : pour une fois qu’on écoute les peuples! Il y a eu également quelques bonnes surprises, comme par exemple l’engagement de certaines grosses firmes transnationales (Coca Cola par exemple) à être plus éco-efficient. Engagement marketing? Laissons leur le bénéfice du doute, si au moins cela sert l’environnement.
Mais surtout, Rio+20, par le nombre de personnes qu’elle a mobilisée, la couverture médiatique dont elle a bénéficiée, aura au moins servi à continuer à porter sur le devant de la scène la cause du développement durable.
Certains déplorent les lenteurs de la bureaucratie onusienne, mais la force de la gourvernance internationale n’est-elle pas d’arriver au consensus en respectant l’avis de tous ? Evidemment, beaucoup de blabla pour un petit texte dans cette conférence, mais peut être que les instances politiques de nos pays vont elles enfin comprendre la nécessité d’une Organisation Internationale de l’Environnement qui punirait les pays ne respectant pas leurs engagements.
Au delà des échecs ou réussites environnementaux (chacun voit midi à sa porte, pour moi c’est une bonne continuité, on ne peut pas sauver la planète en un jour de toute façon), Rio+20 a fait un grand gagnant : le Brésil ! Le pays a été chaque jour un peu plus sur le devant de la scène internationale, les gens ont aimé Rio, Dilma est de plus en plus reconnue comme une chef d’Etat importante et accomplie, tout va bien pour les Cariocas et le reste du pays bien sûr. En plus le secteur hôtellier a du se faire plein de blé sur les chambres (mais ça je cautionne moins).
Reste que si on parle d’environnement, Rio n’est pas un modèle. La première disposition du texte de l’ONU aurait du être d’installer un meilleur tout à l’égoût au Brésil… Et notamment de rendre propre la sortie d’égoût sur la plage de Leblon. Mais non, pas pour bronzer tranquille, pour sauver les poissons !!
Avec tout ça, ma boss qui rentre de Rio va être bien énervée (ils ont rajouté des jours de négociations au début de la conférence parce qu’aucun n’accord n’aboutissait pour le texte ahah, elle a perdu ses vacances), et moi je rentre au pays des caïpi et des cocotiers pour fêter la fin de mon contrat d’ici quelques jours! Je me permets de te féliciter pour ton blog au passage, les photos sont chouettes et j’aime bcp ta préoccupation pour l’environnement. Je me permets de te chiper des idées pour les endroits à visiter, parce que j’y serai en vacances jusqu’en aout : Brasilia, Ilha Grande, le Minas… J’ai hâte!
Salut Marianne,
Ilha Grande est très sympa, je ne peux que te recommander d’y aller quelques jours. Effectivement le monde est petit, et comme Olinda est petit aussi on a du se croiser au moins une fois durant le carnaval !
Merci pour ton (long) commentaire, c’est intéressant d’avoir le point de vu de quelqu’un qui travaille sur cet évènement depuis plusieurs mois. Et j’avoue qu’en écrivant mon article j’espérais secrètement avoir des commentaires de ce type, pour contrebalancer mon article qui manque d’enthousiasme quant à cet évènement…
Je ne sais pas si le Brésil est le grand gagnant de Rio+20. Peut-être as-tu lu l’article de Lamia Oualalou que je cite dans mon texte ([url=http://www.lefigaro.fr/environnement/2012/06/19/01029-20120619ARTFIG00866-le-bresil-leader-sans-influence-du-rio20.php]son article[/url]). Lamia est souvent « pro Brésil », mais elle n’est pas tendre cette fois ci.
D’une manière générale je ne sais pas si le Brésil se porte si bien que ça actuellement. Malgré tous les évènements à venir, la croissance a eu un grand coup de frein (0,8% au premier trimestre, quand les autres pays du BRICS sont entre 4,8 et 6,5%, de mémoire), ce qui me semble être une bulle immobilière et des ménages assez endettés (surtout avec des prêts à la consommation). Sans oublier une corruption plus présente que jamais, qui se rappelle à nous très régulièrement, notamment dans les travaux pour la Coupe du Monde de foot et les JO. Bref, à voir…
Concernant l’écologie au Brésil, j’ai posté il y a quelques mois [url=http://www.travelsteph.com/index.php?option=com_content&view=article&id=448]un article avec photo[/url] qui montre qu’il y a encore du chemin à faire. Et encore, cet article a été écrit avant les derniers changements du code forestier…
Bonnes vacances au Brésil ! Et n’hésites pas à me contacter via mes articles ou par mail (cf. formulaire de contact) si tu veux des infos sur Ilha Grande, le Minas, Brasília ou ailleurs.
Até logo,