Brésil - Vie locale

Inflation annuelle de 2 477%, ou l’obligation de faire ses courses le jour de réception de la paye

16 mai 2010

Fin décembre 2009 j’ai visité à Ouro Préto la Casa dos Contos, l’un des rares monuments ouvert ce jour-là. Outre la maison en elle-même, bâtiment qui était un centre des finances du XVIIIème siècle, l’intérêt de cette visite était la découverte de l’histoire de la monnaie au Brésil. Et son histoire récente est assez étonnante, surtout pour quelqu’un qui, comme moi, n’ai jamais connu de périodes inflationnistes. Voici les différentes évolutions de la monnaie Brésilienne entre 1986 et 1994 :

Août 1984 : Cruzeiro (Cr$)

Février 1986 : Cruzado (Cz$), 1 Cz$ = 1 000 Cr$ (division par 1 000)

Janvier 1989 : Cruzado Novo (NCz$), 1 NCz$ = 1 000 Cz$ (division par 1 000)

Mars 1990 : Cruzeiro (Cr$), 1 Cr$ = 1 NCz$ (pas de changement de valeur)

Août 1993 : Cruzeiro Real (CR$), 1 CR$ = 1 000 Cr$ (division par 1 000)

Juillet 1994 : Réal (R$), 1 R$ = 2 750 CR$ (division par 2 750)

En 10 ans, la monnaie Brésilienne a donc été divisée trois fois par 1 000 puis une fois par 2 750. A titre de comparaison, la dernière modification de la valeur du Franc Français, décidée par le Général de Gaulle en 1958, a été une division par 100 (100 ancien Francs donnaient alors 1 nouveau Franc). Le passage à l’euro a entrainé une division par 6,55957 Francs.

Entre 1986 et 1994, l’inflation au Brésil était extrêmement élevée. En 1993, elle a atteint le niveau record de 2 477% sur un rythme annuel (source Courrier International). Quelques mois avant l’adoption du Réal en juillet 1994, près de la moitié des Brésiliens vivaient en dessous du seuil de pauvreté. Et au même moment, les prix augmentaient au rythme de 50% par mois (donc le pouvoir d’achat de la monnaie diminuait pratiquement de moitié tous les mois), condamnant les plus pauvres à une obsédante précarité. Cette inflation rendait impossible toute planification, que ce soit dans le cadre de la famille ou de l’entreprise. Les situations économiques des personnes comme des entreprises étaient délicates.

La visite de ce musée d’Ouro Préto m’a rappelé une conversation avec des collègues Brésiliens. Ils racontaient que pendant les années d’hyperinflation (il y a seulement 15 ans), ils étaient obligés d’aller faire leurs courses alimentaires le jour même où ils recevaient leur paye. Car s’ils attendaient, les prix s’envolaient tellement vite qu’ils n’étaient plus en mesure de se nourrir convenablement.

Grâce au « Plan Réal » adopté en 1994, la plus importante réforme de l’administration du président Itamar Franco, l’inflation est tombée presque du jour au lendemain à moins de 2% par mois et 25% en rythme annuel. Cette stabilité économique a été très importante pour le développement du pays. Pedro Malan, qui était président de la Banque centrale puis qui a été ministre des Finances déclarait « Avec le Réal, le pouvoir d’achat des salariés a été préservé. Les consommateurs ont pu comparer les prix et préparer l’avenir. La croissance économique s’accompagna d’une énorme augmentation des investissements directs de l’étranger ». Le succès du plan Réal a également joué un grand rôle dans le rétablissement du rayonnement international du Brésil, rayonnement qui s’est intensifié ces derniers mois…notamment lors de la crise économique mondiale.

Ce qui me marque le plus dans cette histoire de la monnaie Brésilienne, c’est la période à laquelle ça s’est déroulé. Ce n’est pas il y a 50 ou 70 ans, c’est il y a seulement 16 ou 17 ans. Même si je commence à me faire vieux, j’aurais connu cette période si j’avais vécu au Brésil à ce moment-là. Et les personnes nés au moment de l’adoption du Réal comme monnaie officielle du Brésil ne sont pas forcément en mesure de comprendre cet article tellement ils sont jeunes !

Depuis une dizaine de jour, la parité entre le Réal et l’Euro a beaucoup variée. Mais cette fois ci le Réal est stable, nous assistons seulement à une chute de l’Euro du, principalement, à la crise Grecque. Maintenant les Brésiliens peuvent faire leurs courses quand ils veulent, mais moi, l’étranger payé en euro, cours faire mes achats en début de mois pour limiter l’impact de la chute de ma monnaie (bien évidemment, rien de comparable avec les variations Brésiliennes du début des années 90) !

Avez-vous connu, vous aussi, de fortes périodes inflationnistes, que ce soit en France (il y a quelques années…) ou à l’étranger ? Comment avez-vous appris à vivre avec ça ? Avez-vous des anecdotes sur le sujet ?

Até logo,

No Comments

Leave a Reply